samedi 21 novembre 2009

Journée des droits de l'enfant ? Et la langue ?

Il est dans l'air du temps de célébrer des journées internationales pour faire prendre conscience à l'ensemble de l'humanité des problèmes spécifiques qu'elle doit résoudre. Hier, c'était la journée des droits de l'enfant, droits hélas trop souvent bafoués, qui permet de rappeler l'existence de la Convention internationale des droits de l'enfant (ONU, novembre 1989).

Or, l'article 30 de ce document signé et ratifié par l'ensemble des pays membres de l'ONU, à de rares exceptions près, doit attirer notre attention :

"Dans les États où il existe des minorités ethniques, religieuses ou linguistiques ou des personnes d'origine autochtone, un enfant autochtone ou appartenant à une de ces minorités ne peut être privé du droit d'avoir sa propre vie culturelle, de professer et de pratiquer sa propre religion ou d'employer sa propre langue en commun avec les autres membres de son groupe."

Cet article est contesté par la France, quels qu'en soient les gouvernements, sous prétexte qu'il n'y aurait aucune minorité linguistique ou culturelle présente sur son territoire. Il est bien connu en effet que tout le monde parle français en France depuis Vercingétorix! L'alsacien, le basque, le breton, le catalan, le corse, les créoles, le flamand, les langues de Polynésie, de Nouvelle-Calédonie ou de Guyane ou encore l'occitan, par exemple, n'ont jamais été parlés par des citoyens français, et c'est une vérité absolument incontestable qu'il n'y a aucune minorité ethnolinguistique dans le beau pays de France!

Certes, le législateur s'abritera habilement derrière la notion d'égalité, amalgamée avec celle d'uniformité, ou encore derrière celle d'indivisibilité de la République (qui serait pourtant désormais "décentralisée") pour justifier qu'il n'y aurait aucune minorité linguistique ou culturelle dans la douce France chère à Charles Trénet, mais on comprend très bien l'embarras que suscite l'article 30 chez nos gouvernants car il met le doigt sur l'objectif de la politique linguistique française : priver les enfants des minorités ethnolinguistiques de leur langue propre au profit du seul français. Reconnaître pleinement cet article 30, ce serait discréditer tous les efforts consacrés depuis des siècles à la disparition des autres langues que le français, et mettre l'accent sur l'absence de volonté officielle de protéger ces langues, encore aujourd'hui pratiquement exclues du système éducatif, des médias, de la vie publique, c'est-à-dire de tous les domaines susceptibles de leur rendre une vitalité confisquée par le seul français.

Bien sûr, lorsque le dernier locuteur du breton ou de l'occitan s'éteindra, il n'y aura plus de minorité à reconnaître, et sans doute le législateur français n'aura plus la moindre réserve sur l'article 30 de cette Convention, mais est-ce vraiment ce que nous voulons ?


jeudi 19 novembre 2009

Transmission des langues minorisées : 20 et 21 novembre

Demain et après-demain, à l'IUFM de Tarbes (Occitanie), aura lieu un colloque organisé par l'Institut d'Estudis Occitans ("Institut d'Études Occitanes", IEO) sur le thème suivant :

La transmission naturelle et familiale de la langue occitane et des langues régionales ou minoritaires en Europe.

Des élus, des spécialistes et des universitaires de domaines très variés, de l'histoire à la linguistique, en passant par la psychiatrie, la sociologie et la recherche pédagogique, interviendront sur l'occitan en général, et, en particulier, sur celui du Béarn, du Val d'Aran et de Provence, le breton et le basque, pour ne parler que des langues des minorités nationales de l'État français, mais aussi sur le galicien, le gallois, l'irlandais et les langues minoritaires de Suède et de Finlande. Seront abordées également les conséquences individuelles et collectives de la non-transmission familiale des langues, l'éducation bilingue et la promotion de la diversité linguistique, pendant que d'autres intervenants parleront d'expériences concrètes de transmission familiale.

Le programme, alléchant, aborde une question fondamentale pour l'avenir des langues que nous voulons préserver et promouvoir : celle de la transmission. Alors que tout a été entrepris en France pour couper les enfants de la langue que leurs parents parlaient encore entre eux, pour inspirer de la honte aux locuteurs, pour proscrire de l'espace public l'occitan, l'alsacien, le breton, le basque ou le corse, bref pour délégitimer toute transmission de nos langues, il est urgent, si nous ne voulons pas qu'elles disparaissent définitivement, d'enclencher le processus inverse en réfléchissant aux moyens concrets de les transmettre.

Nous conseillons, une fois encore, ceux qui le peuvent de se rendre à ce colloque et de bien vouloir, s'ils y assistent ou y participent activement, nous faire part de ce qu'ils y auront appris.

lundi 16 novembre 2009

3 et 4 décembre 2009 à Paris : colloque sur les langues de France

Les 3 et 4 décembre de cette année, à l'Université Paris-Sorbonne, aura lieu un colloque intitulé "Langues et cultures régionales de France, dix ans après : cadre légal, politiques, médias.", dont le programme complet (format PDF) est ici. Sont prévues des interventions sur l'occitan, le catalan, le créole guadeloupéen, l'alsacien, le breton et le basque.

Nous conseillons à ceux qui le peuvent de s'y rendre et de nous faire part de leurs réactions.

dimanche 15 novembre 2009

POUR UNE MANIFESTATION DES LANGUES DE FRANCE

Bonjour à tous !

Dans son discours du 12 novembre dernier, le président français Nicolas Sarkozy s'est exprimé en ces termes sur la diversité culturelle française :

"La France, c’est l’un des pays les plus divers au monde. Cette diversité est inscrite dans les coeurs et dans les esprits, un pays où aucun village ne ressemble à un autre et où chacun s’efforce d’être différent de son voisin. Cette diversité française est une richesse. Chaque culture, chaque tradition, chaque langue a une valeur infinie. Les laisser disparaître serait une faute. Nous nous appauvririons. Nous ne serions pas ce que nous sommes sans que nous ont donné et continuent à nous donner les cultures provençale, bretonne ou alsacienne, sans l’Outre-mer, sans ce que nous ont apporté les Antilles, la Réunion ou Tahiti, l’ouverture qu’elles nous ont donné sur le monde, sans ce que nous ont apporté l’Afrique ou le Maghreb. Regardez ce que la langue française doit à Aimé Césaire ou à Léopold Sedar Senghor. Songez aux trésors que la langue d’Oc a déposé dans notre culture nationale. Notre identité, et c’est le miracle français, est à la fois singulière et plurielle."

Cet hommage à la diversité culturelle est bien beau (encore qu'il soit curieux de la considérer pour ce qu'elle apporte à la France alors qu'on peut l'estimer pour elle-même), mais il sonne creux pour tous ceux qui défendent les différentes langues de France et qui constatent chaque jour combien il est difficile de les transmettre avec une présence dans l'espace public et un enseignement bien insuffisants. Malgré une reconnaissance de ces langues dans la constitution française depuis 2008, on attend en vain qu'elles soient véritablement protégées, et la colère monte au Pays basque, en Occitanie ou en Bretagne. Des manifestations pour les langues occitane, basque et bretonne ont eu lieu avec succès, mais l'Etat restant sourd, une idée d'organiser une manifestation unitaire à Paris, siège du pouvoir central, ou peut-être devant les instances européennes pour demander à la France le respect de sa diversité linguistique, commence à germer.

Nous sommes donc un certain nombre de militants des droits linguistiques à avoir décidé la création de ce blog, en espérant qu'il permette l'échange autour de nos langues pour coordonner des actions que le temps rend de plus en plus nécessaires.